Au-Dela
Genre : Drame
Réalisateur : Clint Eastwood
Synopsis :
Une journaliste française, un jeune londonien et un medium américain. Trois personnes, trois destins qui ont frôlé la mort et qui cherche désormais des réponses à leur questions.
Avis :
Clint Eastwood ne nous avait pas trop déçu ces derniers temps. Mais avec Au-Delà, le maitre boit un peu la tasse, entre fautes de goût irréparables et tendres éclaires de génie.
Le film démarre sur les chapeaux de roue : Marie LeLay, une journaliste française en vacance en Indonésie, est frappé par un violent tsunami, qui dévaste tout sur son passage. Elle perd alors connaissance, puis la vie... seulement pendant quelques secondes. Une absence suffisante pour quelle puisse pénétrer dans le monde des morts. Une séquence haletante et forte, qui a le mérite de vous clouer au siège. Mais Clint Eastwood est loin de se douter qu'avec une ouverture aussi puissante, il allait sceller le destin de son film. Car, l'un des défaut majeur de Au-Delà, c'est de commencer trop vite, délivrant son climax en début de métrage. Du coup, on s'attend forcément à une forte monté d'adrénaline mais, au bout des 45 minutes, cette déferlante d'émotion (ajouté au tsunami, la mort du frère jumeaux ainsi que la séance de spiritisme), fait place à un vide pas loin d'être mortel, la faute notamment à quelques séquences qui tirent irrémédiablement le film en longueur (citons la scène au salon du livre, qui semble interminable). De même, on ressent une instabilité entre les différents fragments du récit. Si les parties Américaine et Anglaise sont très intéressantes, la partie Française, quant à elle, est ennuyeuse et creuse, n'apportant rien de plus au film ni à son thème. Les fautes de goûts sont également présentes musicalement, le cinéaste surlignant indéfiniment ces scènes en France en y ajoutant des nappes d'accordéons et de violons, les nivelant alors de façon irréversible par un coté too-much très lourd (comme si le cinéaste était conscient du manque cruel d'émotion de cette partie). Mais, parallèlement à ses fautes de goût d'un autre âge, Clint Eastwood arrive encore à nous cueillir comme au premier jour grâce à quelques très jolies scènes dramatiques, ou l'on sent plus d'une fois l'émotion et les larmes monter en nous. Il faut dire que les interprètes mettent du cœur à l'ouvrage, en particulier Matt Damon, ainsi que la furtive mais flamboyante participation de Bryce Dallas Howard. Une authenticité toujours présente et qui sauve largement le film du naufrage.
Le réalisateur arrive aussi à un âge ou l'on pense bien plus à ce qui nous attends âpres la mort qu'à ce qui nous reste de souffle de vie. Du coup, il semble totalement légitime qu'il s'interroge sur cela. Mais Clint Eastwood évite totalement l'écueil du registre fantastique avec son lot d'apparitions et de phénomènes paranormaux. Le film est donc bien plus un drame sur la solitude des êtres dans ce monde que sur ce qu'il y a de l'autre coté de la porte. Le but premier de Au-Delà n'est donc pas d'étaler des tonnes d'hypothèses fumeuses, mais de savoir comment vivre ce passage douloureux et délicat d'un monde à l'autre sans rester seul au bord de la route. Un très beau discours qui est, une fois de plus, en demi-teinte. Comme toujours, ce sont les segments Américains et Anglais qui l'emportent haut la main. La solitude que vie le personnage de George Lonegan est touchante et magnifiquement mise en scène, tout comme celle de Marcus à Londres. Malheureusement, on a pas cette même empathie pour le personnage de Marie, pourtant joliment interprété par la rayonnante Cecile de France. Le probléme réside bien plus dans les motivations de son personnage et de son projet de livre. Simple appât du gain avec recherche de reconnaissance superficiel alors qu'elle se fait voler la vedette par une jeune journaliste ? Ou véritable démarche auteuriste afin de mettre en lumière ce que tout le monde cherche à enfouir ? Aucune réponse n'est donné à cela, et ce n'est pas le final, vertigineusement niait (ce qui est assez rare chez ce réalisateur pour être signalé), qui va y répondre de façon définitive.
Vous l'aurez donc compris, il y a donc à boire et à manger dans cette réflèxion élégiaque autour de la mort. Au-Delà est donc loin d'être impeccable, mais quelques flamboyantes scènes viennent sauver le dernier Clint Eastwood de la noyade.