Mad City
Genre : Drame
Réalisateur : Costa-Gavras
Synopsis :
Max Bracckett est un journaliste qui, après s'être fait virer d'une chaine de télévision nationale, se retrouve à ronger son frein sur une chaine locale. Mais lorsque Sam Baily, gardien dans un musée mis à la porte, prend en otage la directrice et des enfants, il tiens ici son ticket pour revenir sur le devant de la scène.
Avis :
Costa-Gavras aime les sujets sensibles, il adore contester et il le prouve une fois de plus avec Mad City, pamphlet sur les médias.
Ah, qu'est ce qu'on ferai pas sans notre bon vieux Gavras. Depuis ses débuts, il s'est fait une spécialité : brosser le portrait de notre société, si possible la repeindre en noir et donner une touche mortuaire au sujet. Ici, il s'attache à démontrer la toute puissance des médias. Alors il écarte de suite les chaines locales, modèle d'intégrité et d'objectivité sans faille, pour tout de suite frapper dans le tas : les grosses machines audiovisuelles. Car, ce qu'il montre parfaitement, c'est l'influence de l'ego de ses journalistes, de l'ambition de ses dirigeants, de la part de marché, de l'audimat sur le traitement d'un sujet banal : une simple prise d'otage. Le film se révèle alors très astucieux dans la façon de faire entrer les personnages. On identifie de suite le grand méchant loup, le goinfre qui vient fourrer son nez dans la bergerie : Kevin Hollander, présentateur vedette du journal. On l'identifie tout de suite comme étant une ordure de première, trafiquant les interviews par le montage (technique beaucoup plus discrète que d'interviewer de faux amis du preneur d'otage, comme le font certaines chaines de tv dite "moyenne").
Mais le film révèle également un autre ennemi de l'objectivité, de la pureté de l'information : Max Bracckett. Son ambition de revenir à l'écran l'amène à manipuler les gestes de Sam Baily afin d'obtenir la sympathie du public. Le film conseil donc, au final, de ne prendre jamais part à l'action, de rester en tant que simple spectateur (l'une des règles de Max, qu'il bafoue assez vite dans le film). Gavras ne fait pas donc que montrer : il dévoile les origines de cette course au sensationnel, et érige les petites chaines en modèle (si elles ne s'efforcent pas à "franchir la ligne" comme dirait Max). Car la démarche du cinéaste est aussi très réfléchit. En effet, il dénonce ici ce qu'il applique dans son film : il montre ce qu'il veut et nous fait croire ce qu'il veut. La preuve la plus flagrante se situe au début du film : on voit Max qui assemble son micro et sa camera comme il assemblerai un fusil (la camera tueuse en somme). Au fond donc, Gavras s'implique dans ce processus de mise à mort médiatique. Il donne un ton impitoyable au film, un coté "règlement de compte au fin fond de la cambrousse" qui se ressent dans la composition électrique et percutante de Thomas Newman. Le casting se révèle également excellent, en particulier Dustin Hoffman qui incarne parfaitement le journaliste coulant. Seul hic : John Travolta, qui grossi parfois trop le trait dans l'interprétation du gardien débile et simplet.
Mad City est donc un excellent pamphlet sur la puissance des médias sur l'opinion public tout en livrant un point de vue sur le cinéma.