Duel
Genre : Fantastique
Réalisateur : Steven Spielberg
Synopsis :
David Mann, modeste employé de commerce, est pris en chasse par un vieux semi-remorque, qui cherche à tout pris à le déstabiliser.
Avis :
Téléfilm devenu film, Duel est la première création d'un cinéaste qui n'a cessé de nous faire voyager au gré de ses références et de ses obsessions.
Se situant au carrefour de trois inspirations, ce Duel est le premier film parfait en tout point, qui réunit à la fois des références cinématographiques connues de tous, la vision d'un cinéaste sur le monde, ainsi que son sens du cadrage. Spielberg transpose ici tous les ingrédients du western : le saloon et sa rixe, le cimetière de voiture, le paysage désertique, une utilisation pertinente du corps fragmenté (multiple gros plan sur les yeux). Il filme les voitures comme des personnages, le camion devenant le chasseur de prime, le tueur en série, et la Plymouth devenant la proie. Ce camion cristallise d'ailleurs toutes les peurs, toutes les angoisses du monde. Il symbolise l'extermination de la vie à l'échelle industrielle, sans âme ni humanité. Il y également une grande part de fantastique, d'étrangeté dans cette situation : ce camion, capable de communiquer avec un train de marchandise, prenant en chasse un homme, sans motif apparent, et sans que l'on découvre le fameux conducteur, comme si celui-ci n'existait pas sans son semi-remorque, apporte une tension irréel mais palpable à l'intrigue. S'y ajoute une pointe d'Hitchcock dans la façon dont Spielberg rythme son intrigue (qui use jusqu'à la corde les moments d'attentes) ainsi que dans le rôle qu'il donne aux personnages féminins, soit totalement dingues (la femme aux serpents), soit précipitant le personnage principal dans une situation inextricable (la femme de David, qui n'a pas autorisée son mari à changer la durit du radiateur).
Une foultitude de référence auquel vient s'ajouter le talent de réalisateur de Spielberg. La réalisation est vraiment exemplaire : alors que le générique nous place dans le point de vue du chasseur (camera subjective sur la voiture de David), on se détache petit à petit de la voiture pour ensuite nous mettre dans la position du poursuivi. Une réalisation à la fois très posé, réfléchit dans les moments de calme, mais se transformant en une vraie machine de guerre lors des poursuites, d'une rare intensité et dont la sensation de vitesse se trouve décuplé sans pour autant paraitre exagéré. Par ailleurs tous ce que l'on peut trouver en terme de grammaire cinématographique est compulser dans ce film : camera à l'épaule, embarqué, travelling, voix-off, gros plan, très gros plan, plan d'ensemble, caméra subjective. Une vraie leçon de cinéma en somme. Dennis Weaver, interprétant le pauvre David Mann, vient quant à lui prouver son talent en couvrant, avec beaucoup d'adresse, un spectre très large d'émotions, du désespoir à la folie, en passant par le doute et la peur.
Duel est donc une réussite car il rassemble tous ce que le cinéma peut offrir en termes de technique de réalisation et de jeu, sans pour autant négliger l'histoire et son efficacité.